L'Autorité de la concurrence (« ADLC ») est investie du pouvoir faire appliquer le droit de la concurrence et notamment les règles relatives aux restrictions verticales et aux abus de position dominante.
Le ministre de l'économie dispose d'un pouvoir d'injonction et de transaction pour le règlement des pratiques anticoncurrentielles locales dès lors que (i) le chiffre d'affaires généré en France par chacune des entreprises concernées n'excède pas 50 millions d'euros (lors du dernier exercice comptable) et que (ii) leurs chiffres d'affaires cumulés n'excèdent pas 200 millions d'euros. Au nom du ministre de l'Economie, les Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRRECTE) peuvent enjoindre aux entreprises de mettre un terme aux pratiques anticoncurrentielles constatées et de régler à l'Etat un montant pouvant s'élever jusqu'à 150 000 € dans la limite de 5 % de leur chiffre d'affaires en France.
Les litiges commerciaux impliquant l'application des règles sur les accords verticaux ou les abus de position dominante (codifiées aux articles L. 420-1 à L. 420-5 du Code de commerce) relèvent de la compétence exclusive de huit tribunaux de commerce spécialisés (Marseille, Bordeaux, Lille, Fort-de-France, Lyon, Nancy, Paris et Rennes).
En France, deux types d'enquête (simple ou sous contrôle judiciaire) peuvent être initiés. Les investigations peuvent être conduites soit par l'ADLC, soit par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
Pendant une enquête simple, les agents de l'ADLC ou de la DGCCRF peuvent accéder à tout endroit utilisé comme local professionnel, ainsi qu'à tout moyen de transport professionnel. Ils peuvent requérir la communication de documents professionnels et en conserver la copie, interroger les employés concernés à condition de les informer de la finalité de l'interrogatoire.
Pendant une perquisition autorisée par un juge, les agents enquêtent sous le pouvoir du juge et, habituellement, en présence d'officiers de police. Dans le cadre de cette procédure, les agents sont autorisés à accéder des locaux privés et professionnels pour conduire leurs investigations et opérations de saisie. Ils peuvent obtenir ou prendre copie (sur support papier ou électronique) de tout document qui pourrait être utile à l'enquête, notamment des emails, sauf s'ils sont couverts par le secret professionnel (par exemple, correspondances avocat-client). Les agents sont également autorisés à recueillir les déclarations des employés.
Pendant la phase précontentieuse, l'ADLC étudie les preuves à sa disposition. Si l'évaluation préliminaire la conduit à considérer que les pratiques constatées présentent un caractère anticoncurrentiel, le rapporteur général adresse à l'entreprise concernée une notification des griefs. A partir de cet envoi, les parties notifiées ont accès au dossier de l'ADLC (qui comprend toutes les preuves disponibles) et peuvent adresser un mémoire en défense sous deux mois.
En outre, la partie notifiée peut faire valoir ses arguments de défense lors d'une audience devant le Collège de l'ADLC.
L'ADLC rend ensuite sa décision, qui peut consister en :
- Une décision de non-lieu (il n'y a pas d'éléments pour poursuivre la procédure) ;
- Une transaction qui permet à l'entreprise visée d'être condamnée à une amende moins importante ;
- Une amende qui peut être accompagnée d'une injonction ou de la prise d'engagements par la partie concernée de modifier son comportement afin de se conformer à la règlementation. L'ADLC peut aussi ordonner la publication de sa décision.
Enfin, dans de très rares cas (pratiques anticoncurrentielles impliquant des personnes physiques), l'ADLC peut renvoyer l'affaire aux juridictions pénales.
Il convient de noter qu'à l'issue de la phase précontentieuse, l'ADLC peut aussi décider de ne pas ouvrir de phase contentieuse pour les raisons suivantes :
- Défaut d'intérêt à agir ;
- Prescription ; ou
- Absence de preuves.
Des mesures transitoires peuvent être prononcées au début de la procédure dans des conditions spécifiques.
L'ADLC peut prononcer des mesures transitoires pour mettre fin aux pratiques ou suspendre une action illicite. Les mesures doivent être strictement proportionnées.
En outre, comme mentionné à la question 3, l'ADLC peut :
- Enjoindre à l'entreprise concernée de cesser la pratique anticoncurrentielle et/ou de modifier son comportement en prenant des engagements en vue de se conformer au droit de la concurrence pour le futur ;
- Prononcer une amende d'un montant maximal de 10 % du chiffre d'affaires du groupe auquel appartient l'entreprise sanctionnée, le chiffre d'affaires retenu le plus élevé pendant la période où des pratiques anticoncurrentielles ont été relevées ;
- Prononcer une amende d'un montant maximal de 5% du chiffre d'affaires moyen réalisé par la partie concernée par jour de retard afin qu'elle se conformer à une injonction de l'ADLC ou à un engagement pris par ses soins ; et
- Ordonner la publication de la décision dans un journal et, parfois, sur le site Internet de l'entreprise concernée.
L'ADLC n'est pas autorisée à octroyer des dommages et intérêts aux victimes de pratiques anticoncurrentielles.
Les critères utilisés pour calculer les amendes prononcées sont fixés par la loi et ont été précisés dans un communiqué publié par l'ADLC en 2011.
L'amende doit être proportionnée à la gravité de la violation des règles de concurrence et au dommage causé à l'économie. La situation financière de l'entreprise sanctionnée doit aussi être prise en compte, de même que la récidive le cas échéant. Les amendes sont individualisées pour chaque entreprise condamnée.
La procédure d'engagements est un outil efficace pour réguler les pratiques commerciales et faire appliquer le droit de la concurrence. La mise en œuvre de la procédure d'engagements suppose qu'aucune notification des griefs n'ait été adressée par le rapporteur général. Le rapporteur général expose son évaluation préliminaire des pratiques alléguées aux entreprises qui font l'objet d'une enquête. Ces dernières doivent ensuite formaliser et soumettre leurs engagements dans un délai maximal d'un mois. Par la suite, le rapporteur général communique ces engagements à la partie requérante, le cas échéant, et au ministère public et publie un résumé de l'affaire accompagné des propositions d'engagements de l'entreprise afin de permettre aux tiers de formuler des observations.
Toutes les observations de tiers doivent être communiquées au rapporteur général dans un délai d'un mois maximum à compter de la publication du résumé de l'affaire. Les entreprises faisant l'objet de l'enquête ont également l'opportunité de présenter des observations orales pendant une audience.
Enfin, l'ADLC adopte une décision d'acceptation ayant force obligatoire.
L'ADLC contrôle la mise en œuvre de ces engagements régulièrement pendant une période donnée. Les entreprises concernées doivent communiquer régulièrement à l'ADLC des documents de reporting.
S'agissant des transactions, elles peuvent être mises en œuvre après la notification des griefs à condition que les entreprises concernées acceptent de ne pas contester les griefs. La transaction fixe le montant minimum et le montant maximum des amendes potentielles qui peuvent être prononcées par le collège de l'ADLC. Dans le cadre de la transaction, les parties peuvent également proposer de modifier leurs comportements afin de se conformer au droit de la concurrence.