Le 10 janvier 2019, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a transmis au Procureur de la République de Bobigny les conclusions de ses investigations concernant le site vente-privée.com.

L’administration accuse l’entreprise d’avoir « cherché à donner à ses clients l’illusion de faire une bonne affaire en mettant en place différentes stratégies frauduleuses visant à construire un prix de référence fictif ».

Le prix de référence est le prix à partir duquel un vendeur calcule le pourcentage de réduction accordé aux consommateurs. En pratique, il s’agit souvent du prix qui apparait barré à côté du nouveau prix de vente.

Pour comprendre ce que reproche la DGCCRF à vente-privée.com, il est important de comprendre comment se calcule un prix de référence et de revenir sur l’évolution des méthodes de calcul admissibles en droit français.

 

En application de l’arrêté du 31 décembre 2008 aujourd’hui abrogé, les opérateurs, dont ceux du e-commerce, pouvaient utiliser comme prix de référence :

  • Le prix le plus bas effectivement pratiqué par l’opérateur au cours des trente jours précédant l’annonce de la réduction de prix ; OU
  • Le prix conseillé à l’opérateur par le fabricant ou l’importateur du produit ou le prix maximum résultant d’une disposition de la réglementation économique ; OU
  • Le dernier prix conseillé si le produit concerné (i) n’était pas commercialisé sur le site Internet de l’opérateur avant l’annonce de la réduction et (ii) ne faisait plus l’objet d’un prix conseillé par le fabricant ou l’importateur. Dans ce cas, l’annonce de réduction de prix, à côté du prix de référence, devait faire état de la mention « prix conseillé » et être accompagnée de l’année à laquelle ce prix se rapportait, le prix utilisé ne pouvant être antérieur à trois ans avant le début de la publicité.

Toutefois, une décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 10 juillet 2014 jugeant incompatible la règlementation belge sur les annonces de réduction de prix avec la directive européenne 2005/29/CE du 11 mai 2005, rendait également l’arrêté du 31 décembre 2008 contraire au droit communautaire.

Dans ces conditions, la France était contrainte d’abroger l’ancienne définition du prix de référence par arrêté du 11 mars 2015.

 

Désormais, les annonceurs peuvent librement déterminer leur prix de référence à condition de s’assurer que leurs opérations promotionnelles ne soient pas constitutives de pratiques commerciales déloyales. En d’autres termes, les opérateurs doivent s’assurer qu’un consommateur d’attention moyenne n’est pas susceptible de se méprendre sur l’existence et l’ampleur de la réduction de prix.

Par un arrêt du 11 juillet 2017, la Cour de cassation est venue préciser que les juges du fond doivent vérifier si les prix de référence sur lesquels se base la promotion ont bien été précédemment appliqués. La Cour rappelle également qu’il convient d’apprécier « l’incidence de la pratique concernée sur le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé ».

Dans l’affaire qui nous occupe, la DGCCRF reproche à vente-privée d’avoir utilisé des prix barrés « ne correspondant à aucune réalité économique ». Il conviendra toutefois d’attendre une éventuelle décision judiciaire pour apprécier quels sont les éléments retenus pour démontrer le caractère déloyal ou non des annonces de réduction de prix du site de vente événementielle. En effet, malgré l’arrêt de la Cour de cassation, il peut s’avérer difficile d’apprécier la licéité d’une annonce de réduction de prix.

 

Pour limiter au maximum les poursuites, on ne saurait que trop recommander aux annonceurs de se faire assister d’un conseil qui pourra directement valider leur projet de promotion et, le cas échéant, les assister dans le cadre d’un rescrit en matière d’affichage des prix. En effet, les annonceurs ont aujourd’hui la possibilité de saisir l’administration pour qu’elle prenne formellement position sur leurs projets d’annonces de réduction de prix aux consommateurs.

Pour se prémunir efficacement contre un changement d’appréciation de l’administration et une éventuelle sanction administrative, l’annonceur aura tout intérêt, avec l’aide de son conseil, à constituer un dossier exhaustif présentant son projet de promotion. Ce dossier devra comporter tout document explicatif ou photographie permettant de faciliter la prise de position de l’administration.

Cette procédure est d’autant plus attractive qu’elle permet aux opérateurs de saisir l’administration directement via un formulaire sur son site Internet.

En revanche, cette procédure présente l’inconvénient majeur d’être une procédure lente. L’administration dispose en effet d’un délai de dix jours ouvrés pour accuser réception de la demande puis de deux mois pour répondre à la demande à compter de la réception du dossier. De tels délais peuvent se révéler incompatibles avec les impératifs de rapidité liés à la vie des affaires. Cette procédure est donc a priori à réserver à la validation d’opérations habituelles et récurrentes mais se révèlera inadaptée pour des opérations ponctuelles.

 

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